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S'acclimater au climat tropical

Le défi en climat tropical: comment notre corps lutte-t-il contre la surchauffe intérieure? S'adapte-t-il à la chaleur ambiante? Comment ?
Après avoir abordé l'origine de notre chaleur interne et les mécanismes physiques et physiologiques de perte de la chaleur par notre corps, nous développerons l'acclimatation à la chaleur : comment s’acclimate-t-on ? Quelles modifications se produisent dans le fonctionnement des organes pour se refroidir à moindre coût pour l’organisme ? A quelle vitesse peut-on s'acclimater à une ambiance chaude ?

Les gains et les pertes de chaleur obligatoires

Nous sommes des homéothermes: notre température corporelle interne reste autour d'une valeur constante (36,8 +/-0,5°C) correspondant au fonctionnement optimal de nos organes et cellules, grâce à un équilibre entre nos gains et nos pertes de chaleur.

Une production permanente de chaleur

Vivre, c'est réaliser en permanence des réactions cellulaires qui dégagent de la chaleur.
La survie proprement dite est assurée par les organes  « nobles » (cerveau, cœur, poumons, foie...) dont le fonctionnement, relativement stable, dégage en permanence une quantité importante de chaleur. S'il n'existait pas des mécanismes de dissipation de chaleur, notre température interne augmenterait de 1°C par heure juste pour l'activité de survie.
Tous les autres organes libèrent également de la chaleur proportionnellement à leur activité. L'activité musculaire est responsable des augmentations les plus importantes: une activité physique modérée augmenterait notre température interne de 2°C par heure s'il n'y avait pas les déperditions.
De légères augmentations de température interne s'opèrent également sous l'effet des émotions ou du stress, de la progestérone chez la femme en deuxième partie de cycle menstruel, ou encore pendant les phases de sommeil paradoxal (phases où l'on rêve).

Sans mécanismes de dissipation de la chaleur, l'hyperthermie mortelle serait très vite atteinte, même en climat tempéré.

Les pertes obligatoires de chaleur en climat tempéré

La chaleur produite par les organes réchauffe le sang. En circulant dans tout l'organisme, le sang amène de la chaleur dans la peau où elle peut se dissiper dans l'environnement par 4 mécanismes physiques :

  • la radiation (principal mode de perte de chaleur: 60 % des pertes totales en ambiance tempérée)

La peau, comme tout élément chaud, émet de la chaleur sous forme de rayonnements infrarouges. Plus la peau est chaude (ce qui dépend de la quantité de sang qui y circule), plus la surface de peau exposée au milieu ambiant est importante, et plus l’organisme perd de la chaleur par radiation.

  • la conduction (perte modérée à négligeable : 3% des pertes totales)

Toucher la surface d'objets immobiles, plus froids que la peau, les réchauffe et refroidit la peau (par ex. le sol, un mur, les vêtements).

  • la convection (perte estimée à 12 – 15 % des pertes totales)

Nous perdons de la chaleur en chauffant les fluides qui circulent sur la peau (air ou eau) ou sur les muqueuses respiratoires (air). Les pertes par convection dépendent de la différence de température entre la peau et les fluides environnants: plus la peau est chaude par rapport à l'environnement ou plus l'environnement est frais par rapport à la peau, et plus la perte de chaleur est importante.

Ces trois mécanismes, importants pour dissiper l'excès de chaleur, sont également pourvoyeurs de chaleur en climat tropical.

  • l'évaporation (perte estimée à 22 – 25 % en climat tempéré)

Un peu d'eau diffuse continuellement par les glandes sudoripares (ce n'est pas de la sueur) et dans l'air expiré, et s'évapore au contact de l'air. Ce changement d'état (eau liquide → vapeur d'eau) consomme de l'énergie, qui EST la chaleur de la peau. Plus l'air est sec, plus l’évaporation est efficace et plus l'effet réfrigérant est important.

Equilibre / déséquilibre

L'équilibre entre production et perte de chaleur par ces quatre mécanismes est obtenu en étant au repos, dans une ambiance fraîche, à l'ombre et à jeun.

Augmentons maintenant la production interne de chaleur , par ex. en faisant un bel effort physique ou en digérant un copieux repas. Ou réduisons la dissipation de la chaleur par la peau en nous mettant en plein soleil, ou en vivant en climat bien chaud voire et humide. Ou faisons tout cela à la fois pour mettre au défi notre corps...
La température interne augmente, trop. Elle dépasse un seuil admissible par l'organisme et active deux réponses physiologiques pour perdre un supplément de chaleur.

Les pertes régulées de chaleur

La thermorégulation entre maintenant en jeu pour perdre encore plus de chaleur.
Plus précisément, divers récepteurs à la chaleur situés dans la peau et les organes profonds envoient leurs informations à l'hypothalamus, une structure nerveuse située dans le cerveau. La moyenne des températures relevées par les différents récepteurs y est comparée à une température de référence et lorsque celle-ci est dépassée (au delà de 37 à 38°C), le système nerveux active deux réponses physiologiques: la vasodilatation cutanée et la transpiration.

Les vaisseaux de la peau se dilatent ( = vasodilatation cutanée). Le sang afflue dans la peau. Elle chauffe et perd encore plus de chaleur par radiation et convection. Le sang se « rafraîchit » donc en circulant dans la peau, il retourne vers les zones profondes du corps où il se réchauffe, puis revient dans la peau où il se refroidit... tant que la température ambiante est inférieure à 35°C.
Parallèlement, la fréquence cardiaque augmente.

Le deuxième mécanisme mis en place est la transpiration, qui en mouillant la peau, augmente les capacités d'évaporation. Elle est toujours précédée de la vasodilatation cutanée, les glandes sudoripares ayant besoin du sang pour fabriquer la transpiration (= sueur).

  • L'évaporation de la transpiration est le seul mécanisme efficace pour refroidir le corps lorsque la température ambiante dépasse 35°C.
  • La transpiration sans évaporation est plus néfaste que bénéfique: elle ne refroidit pas le corps et peut faire perdre énormément d'eau et de minéraux (entre autres chlorure et sodium) au corps à l'origine des malaises dus à la chaleur.

Ces deux réponses physiologiques ne dépendent que du besoin d'évacuer un excès de chaleur interne et ne s'arrêtent que lorsque la température interne est revenue à la valeur de référence,Elles ne dépendent ni de la température, ni de l'hygrométrie ( = degré d'humidité) de l'air ambiant et peuvent s'avérer contre-productives en climat tropical (voir« mieux supporter la chaleur en milieu tropical »).

S'acclimater à la chaleur

Il est possible de préparer son corps à répondre de manière plus performante à la chaleur ambiante : c'est l'acclimatation. Des modifications physiologiques se mettent progressivement en place dans un délai dépendant de la condition physique des personnes.

S'exposer à la chaleur pour s'acclimater 
L'acclimatation à la chaleur se fait en s'exposant à une chaleur ambiante suffisante pour déclencher la thermorégulation (ex. 30 à 40°C).
Elle se fait naturellement et de façon lente et progressive lors des changements de saisons.
Elle survient également en s'exposant artificiellement à une ambiance chaude durant de courtes périodes mais de façon répétée (méthode utilisée par les sportifs de haut niveau).
Les mécanismes d'adaptation dépendent de plus du degré d'hygrométrie de l'air: en tenir compte pour l'acclimatation.

Les réponses cardiovasculaires et sudorales optimisées par l'acclimatation
Les données disponibles concernent essentiellement des sportifs faisant des séances d’entraînement de courte durée dans une ambiance chaude. Après une quinzaine de jours, on observe :

- une augmentation du volume de sang total
L'exposition à la chaleur détourne une partie du sang vers la peau (vasodilatation cutanée) au détriment des autres organes, ce qui est très rapidement compensé par une arrivée d'eau supplémentaire dans le sang venant des reins. Le sang est plus dilué mais son volume total a augmenté. Les intérêts sont de pouvoir stocker plus de chaleur dans le sang et de stabiliser le travail du cœur.

- une diminution de la fréquence cardiaque
Le rythme du cœur au repos diminue bien qu'il fasse un travail plus important (faire circuler un plus grand volume de sang dans un réseau de vaisseaux sanguins plus vaste), ce qui laisse une réserve cardiaque pour pratiquer une activité physique. Il augmente moins lors d'un effort physique. Avantage connexe: il dégage ainsi moins de chaleur au repos et à l'effort.

- une diminution de la température corporelle
Au repos, le métabolisme basal (= activité cellulaire de survie) d'une personne acclimatée est plus faible ce qui abaisse légèrement sa température corporelle de 0,2 à 0,4°C. En activité, les muscles produisent moins de chaleur pour un même effort fourni.

- une vasodilatation cutanée plus rapide 
La vasodilatation cutanée est activée à une température corporelle interne moins élevée.

- une transpiration plus efficace 
L'acclimatation réduit le délai entre le début d'un effort et l'apparition de la transpiration, augmente le nombre de glandes sudoripares actives, améliore l'approvisionnement des glandes sudoripares en eau (en sang) et favorise la réabsorption des ions minéraux (ex. sodium, chlorure, potassium) par les glandes sudoripares : la perte de ces minéraux dans la transpiration est minorée et la transpiration, moins « concentrée », s'évapore mieux.

- une amélioration de la sensation de confort thermique, qui favorise le bien-être, la motivation et les performances à la chaleur.

Une vitesse d'acclimatation améliorée par une bonne condition physique
Dans le meilleur des cas, 75 à 80 % des adaptations physiologiques surviennent au cours des 5 à 8 premiers jours d'une exposition quotidienne à la chaleur. La fréquence cardiaque diminue après 4 à 5 jours, la température corporelle après 7 jours (ce qui favorise aussi le confort thermique), le volume sanguin et la transpiration sont optimisés en 10 à 15 jours.
Etre en bonne condition physique ET pratiquer une activité physique à la chaleur accélère l'acclimatation : un athlète s'entraînant plusieurs heures par jour à la chaleur s'acclimatera en 15 jours maximum, une personne pratiquant deux heures par jour d'exercice modéré en ambiance chaude le sera en 2 à 6 semaines. Une personne résolument sédentaire s'acclimatera en …. je vous laisse compléter !

Les personnes en surpoids s'acclimatent plus difficilement ( (le cœur est déjà bien sollicité au repos et en ambiance tempérée pour envoyer le sang dans les vaisseaux des tissus graisseux, le tissu graisseux est de plus un isolant thermique qui défavorise les déperditions de chaleur) , de même pour les personnes âgées (avec l'âge, le cœur pompe moins bien le sang, les tissus contiennent moins de vaisseaux sanguins, la vasodilatation est diminuée ainsi que l'activité des glandes sudoripares ), pour les très jeunes enfants (la thermorégulation manque d'efficacité car le système nerveux central est encore immature).
Les personnes souffrant de déficiences cardiaque ou rénale peuvent ne jamais pouvoir s'acclimater à la chaleur.

Et la désacclimatation à la chaleur ?
Plus un personne est physiquement entraînée, plus elle se désacclimate lentement.

Pour résumer

La chaleur est produite essentiellement par les organes profonds et les muscles. Elle se dissipe au niveau de la peau. La sang est le vecteur de chaleur dans l'organisme, il fait la connexion entre les organes profonds et la peau.
La thermorégulation dans la lutte contre le chaud est l'ensemble des mécanisme physiologiques activés lorsque le corps a besoin de se refroidir. Elle met en jeu le système nerveux (qui détecte une élévation anormale de température interne et y répond), le métabolisme des organes (qui libère de la chaleur), le cœur et les vaisseaux sanguins (travail cardiaque pour propulser le sang dans les vaisseaux et variation du calibre des vaisseaux) , la peau et les glandes sudoripares (transpiration et évaporation), les reins (réabsorption d'eau et d minéraux).

L'acclimatation est une optimisation de leur fonctionnement à la chaleur: le corps se refroidit plus rapidement et avec moins de pertes pour l'organisme (d'énergie, d'eau, de minéraux). Elle demande au minimum 15 jours pour des personnes en très bonne condition physique. Ce qui pose problème lorsque le passage d'un climat froid/frais à un climat tropical est rapide : les mécanismes de dissipation de la chaleur interne peuvent être dépassés, générant des troubles ou des malaises dus à la chaleur . D'où l'importance d'adapter son comportement pour minimiser l'impact du climat tropical (ou des vagues de chaleur ...) et ne pas en arriver là! 

 

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