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Confinement, isolement, promiscuité: 7 ans d'expérience!

Volontairement en bateau comme nous, ou imposé comme en ce moment par le covid19, la question est : comment ne pas devenir dingue et vivre le plus sereinement possible le confinement, l'isolement social, la vie dans un espace très réduit avec d'autres, ou plusieurs de ces facteurs ensemble.

J'utilise volontairement ce mot « dingue » car je l'ai ressenti épisodiquement mais régulièrement ainsi : je vais devenir dingue : de désœuvrement, de frustration, de manque de contacts sociaux, de stimulations externes, d'anxiété, d'absence totale d'intimité, de manque de liberté d'action, bref de pouvoir décisionnel sur ma vie.

Pour comprendre la suite : nous vivons en couple sur un voilier, jamais à la marina, le plus souvent dans des endroits paumés car nous aimons la nature, ce qui veut dire être isolés, ne dépendant souvent que de nos propres ressources, parfois confinés pendant plusieurs semaines lorsque les conditions ne nous permettent pas de sortir du bateau et débarquer à terre. Cela arrive régulièrement depuis que je vis sur un bateau, soit depuis 7 ans.

D'où viennent les difficultés ?

1) L'autonomie matérielle:
comment évaluer ses besoins en aliments et produits d'hygiène pour ne pas être pris au dépourvu

2) Les activités :
les activités courantes, la recherche de nouvelles activités-détente, les activités-curiosité, en faire des activités « doudous » qui font du bien au moral

3) Les besoins de base :
se créer un petit « territoire » à soi, physique et mental, à défendre de toutes ses forces

4)Préserver son mental de vainqueur et limiter l'exposition au stress

5) L'activité physique.

J'ai hésité à fractionner ce long texte, mais finalement, je préfère le poster en entier, car c'est difficile d'en dissocier les aspects : manquer de produits de première nécessité devient un sujet de préoccupation qui peut tourner en boucle sans rien pouvoir y changer, donc autant se changer les idées par des activités motivantes. Manquer d'activités motivantes agit sur son moral et celui de son entourage par proximité, avec l'irritation ou la frustration qui monte. Etre anxieux, stressé coupe l’appétit, ou au contraire le décuple, mais qu'y a-t-il dans les placards et que sait-on cuisiner? La sédentarité liée au confinement engourdit le corps et la tête, modifie la perception que l'on peut avoir d'une situation et le cercle vicieux des idées noires pointe son nez.

1. L'autonomie matérielle

Comment évaluer ses besoins en aliments et produits d'hygiène pour ne pas être pris au dépourvu!

Cela veut dire avoir évalué ses besoins alimentaires et en matériel en amont, puis faire ses achats pour couvrir les besoins pour une période donnée : 1 semaine, 2 semaines, un mois ... sans avoir à sortir/ trouver un magasin/ trouver les produits dans le magasin.

Pour nous en bateau, il s'agit des besoins des personnes et des besoins en matériel, équipement, réparation du bateau. Je ne parlerai pas ici des besoins spécifiques au bateau.
Pour les personnes, je fais régulièrement les courses non pas pour une semaine ou 15 jours, mais plutôt pour 6 mois ou un an. La liste est longue, elle indique les produits à acheter et les quantités pour chaque produit, pour un nombre de personnes et une durée d'isolement donnés.

Il n'y a pas de liste type puisque d'une famille à l'autre, nous ne mangeons pas la même chose, ne les cuisinons pas de la même façon, n'utilisons pas au même rythme les produits d’hygiène et d'entretien. Toujours est- il que le principe est simple : ouvrez tous les placards, le réfrigérateur, le congélateur et listez tout ce qu'il y a dedans. Evaluez approximativement à quel rythme vous les consommez (1 paquet tous les 2 jours, 1 par semaine...). Puis affinez les quantités en faisant une bonne observation de votre consommation sur une semaine ou, pour plus de précision, sur un ou deux mois quand c'est possible. Inutile de racheter les produits déjà stockés en quantité, c'est qu'il ne sont pas beaucoup consommés !.

Par exemple : pour 2 personnes : 3 semaines de vie pour 1 tube de dentifrice à deux ; 1 rouleau de papier toilette disparaît en 2,5 jours en moyenne ; 8 kg de farine par mois pour les gros amateurs de pains, brioches, biscuits maison que nous sommes ; on consomme plus d'aliments chaud quand il fait froid et plus de denrées froides quand il fait chaud ; davantage de douches donc de savon ou gel-douche dans la journée quand le thermomètre affiche 35°C etc...

Puis viennent les produits de deuxième, troisième, quatrième etc... nécessité : la pharmacie de bord (de l'antalgique aux attelles et fils à suturer...), les piles, cartouches d'imprimante, papeterie, petit bricolage détente, lentilles de contact et produits pour un an, cartes prépayées de téléphone etc...

En fait, c'est le plus simple à gérer. Reste qu'au bout d'un certain temps de vie en isolement, certains produits ont disparu des stocks. Comment faire autrement ? En recherchant les produit s'en approchant le plus : se laver au shampooing ou au produit vaisselle ; remplacer un aliment par un autre ayant des valeurs nutritionnelles voisines: source d'énergie, de protéines de bonne qualité, de vitamines, de fibres, d'antioxydants (bonne occasion de modifier ses habitudes alimentaires)...

Soyons positif, nos habitudes de consommateurs sont bousculées mais cela développe créativité et réflexion, oui même pour un rouleau de papier toilette!

2. Les activités

Les activités courantes, la recherche de nouvelles activités-détente, les activités-curiosité

Les activités courantes : cuisine, toilette, lessive, ménage, poubelles

Aussi appelées corvées quand aucun des protagonistes n'a envie de les faire...

La meilleure solution pour éviter les frustrations des uns de se sentir exploités ou des autres qui voudraient s'y mettre (oui oui ça existe!) est de se concerter, quand on est confiné à plusieurs, pour répartir de façon équitable, selon les capacités, les compétences, les envies préférentielles de chacun, sans devoir subir l'inertie des uns ou les exigences implicites des autres, dictées par un conditionnement inconscient de ce que « doit » faire un enfant, un adulte, un homme, un garçon, une femme, une fille.

Cela peut être l'occasion pour les « non-experts » d'apprendre à cuisiner, à manier l'aspirateur, à utiliser une perceuse ou une scie sauteuse, à comprendre le fonctionnement cet engin magique qu'est la machine à laver le linge (magique car je n'en ai pas au bateau, la lessive à la main est une activité chronophage bien partagée!).

Les activités détente = trouver de nouveaux repères

L'importance de l'activité physique mérite un chapitre à elle seule. Elle sera abordée plus loin.

Il ne s'agit plus d'attendre la fin du confinement pour trouver de nouvelles activités liées à cette condition de confiné. Le temps est là, pour innover avec ce que l'on sait faire et ce que l'on a sous la main, se perfectionner et voir avec une immense satisfaction nos nouvelles réalisations très réussies. Le but est de se faire plaisir évidemment, mais aussi de se concentrer sur une activité donc de se vider la tête des préoccupations pendant un moment, de se rafraîchir les idées dans un environnement clos, bref, de booster son bien-être.
Sans oublier de se féliciter soi-même chaudement pour ses initiatives, progrès, réalisations, nouvelles façons de penser ou d'agir!

Personnellement, passer d'une vie active avec travail, famille, activités distrayantes (la danse pour moi) à une vie en couple, en circuit fermé et en pays étranger n'a pas été facile. « Et maintenant, on fait quoi ? » «  Ben... rien, on rêvasse sur le sens de la vie ! ». Punaise ! je peux rêvasser 15 minutes, 30 minutes maximum, mais que vais-je faire des 23h30 restantes  de ma journée ? Balade à terre (encore faut-il pouvoir sortir du bateau), regarder un film, cuisine et repas, câlins, dodo, c'est vraiment ça , et uniquement ça, pour les prochaines années ? Certes, la journée est bien remplie mais certains de mes besoins fondamentaux ne sont absolument pas satisfaits !

D'où la recherche de nouveaux repères, c'est à dire d'activités très personnelles. Voici quelques stratégies que j'ai mises en place :

  • Adapter ses anciennes activités aux contraintes

J'ai pris ce que je savais faire et que je faisais dans ma vie active, dans un domaine qui me passionne, que j'ai adapté à ma nouvelle vie de bateau, avec ses nouvelles contraintes. Puis grâce à internet, j'ai pu continuer à transmettre et à partager ces sujets qui m'intéressent. Avec le plaisir de voir ce blog devenir un livre.

Plus concrètement, ce blog m'a donné un but et de l'enthousiasme pour l'alimenter.
Etant isolée, j'ai appris seule comment fonctionne un blog, choisis un site, décortiqué son fonctionnement, écrit et publié : c'était la 1ere phase, de découverte, entrecoupée de désespoir  profond ("je suis trop nuuulle!") de ne rien comprendre parfois.

La deuxième phase est venue de la nouveauté de la situation, qui m'a fourni l'inspiration : je me posais plein de questions sur cette nouvelle vie, notamment sur comment adapter ce que je savais à ce que je vivais.

3ème phase : en parallèle, le cap'tain, très fort en cuisine m'a appris beaucoup de choses, grâce auxquelles la partie théorique du blog s'est complétée d'une partie beaucoup plus pratique : c'était une autre phase de découverte et d'expérimentation devant la gazinière cette fois, très motivante.

Au final, ce blog m'a permis d'utiliser mes connaissances en santé/biologie humaine /alimentation et de partager ces informations, sans être ligotée par un programme officiel décrivant point par point ce qu'il faut aborder auprès du « public » (élèves de lycée et BTS) : une énorme bouffée de liberté d'expression dans mon monde confiné, tout  en continuant à faire ce que j'aime (transmettre et partager) sur un sujet qui me passionne (le corps humain à toutes ses échelles), en abordant une nouvelle approche et un nouveau média. Et voilà pour la tête!

  • Se créer de nouvelles activités ... avec ce que l'on a sous la main :

"Que pourrais-je faire de vraiment nouveau ?". Le temps est là pour découvrir et se perfectionner dans une nouvelle activité, quelle qu'elle soit , en étant indulgent avec soi si les résultats au début ne sont pas toujours à la hauteur des espérances... On ne peut que s'améliorer en persévérant !

Pour moi, cela a été (et est toujours) la cuisine, avec pour principal objectif d'avoir une alimentation la plus variée et la plus équilibrée possible avec ce que l'on a et ce que l'on trouve.
Bienvenue cakes ratés, biscuits cramés, tests de nouvelles recettes au final immangeables. Dans ma vision limitée de la cuisine, faire un
pain ou une mayonnaise relevait d'un chef 3 étoiles et une recette était comme un protocole de biochimie qu'il fallait respecter avec exactitude, avec un E très majuscule à « exactitude » ! En fait, la cuisine laisse une énorme liberté de réalisation pour peu qu'on ait acquis une petite culture culinaire : comprendre le rôle d'un produit dans une recette, connaître son goût, sa texture, par quoi le remplacer en cas de pénurie ( d'oeuf, de fromage, de beurre, d'un type de féculent …).
Puis nous avons changé de pays, trouvé d'autres produits frais, des magasins peu achalandés ou pratiquant des prix défiant toute concurrence, dans le mauvais sens du terme. Nous nous sommes tournés vers les produits locaux (patates douces, régimes de bananes,
fruit à pain, corossol, noix de coco etc...) avec quelques grandes questions existentielles : ah bon, ça se mange ? Comment le cuisiner ? Comment varier les préparations ? Nouvelle expérience très motivante : la chasse aux recettes locales et les tests culinaires : « c'est bon : recette gardée ; pas bon : recette éliminée du grand cahier ».

  • Réaliser un rêve ... jamais réalisé faute de temps !

Vous av(i)ez un don ? Une passion pas du tout lucrative ? C'est le moment de s'y mettre, si c'est possible avec ce dont vous disposez. Chanter, danser, bricoler sérieusement, commencer un petit potager, écrire un livre, composer la musique qui trotte dans la tête, battre le record de pompes ou de corde à sauter, que sais-je, je ne suis pas dans votre tête ni dans votre vie !
C'est dès maintenant qu'il faut s'y mettre ! Pas de timidité ! Pas de procrastination ! Hop ! On fait le premier pas (le plus dur) !

"Je serai astronaute!", bon, ce rêve-là n'est pas encore réalisé. " Je serai artiste!": jusqu'en Terminale comprise, les marges de mes cahiers étaient ornées de dessins de doigt, de main, d'oeil, de profils de mes petits camarades. En prépa: fini de dessiner mon entourage, c'était des plantes, des fossiles, des belles réactions chimiques pleines de substrats et de produits. Cela n'a pas été les Beaux -Arts, mais l'agreg de biochimie, puis prof, avec des jolis dessins dans mes polys et au tableau - dont tout le monde se fichait bien. 
Mais l'envie de dessiner et d'utiliser mes mains était toujours là.

Plus récemment, le voyage nous a emmené dans des contrées sauvages, désertes, maginfiques. Plus de réseau, plus d'internet, ma première et nouvelle activité de blog s'est arrêtée d'elle même. "Que faire, que faire... " Tiens, du papier, des fusains au fond du placard, qui m'accompagnent depuis des années sans sortir de leur boîte. Nouvel objectif : dessiner chaque baie dans laquelle nous nous arrêtons. Puis extension de l'activité aux dessins à partir de photos de paysages, de personnages, sur des supports variés, plus ou moins réussis, mais en retraçant l'évolution du trait depuis 4 ans, c'est un fait, s’entraîner encore et encore amène à des progrès bien visibles !

Les activités-curiosité : sur n'importe quel sujet,tout est bon à prendre
Le défit : apprendre au moins une nouvelle chose par jour - sur le monde ou sur soi!- avec la satisfaction le soir de penser qu'on en sait un peu plus que le matin quand on s'est levé.
Moi, j'aime bien...

Cela peut venir de l'observation de la nature : comment s'organisent les feuilles sur une tige ? Combien de pétales pour cette fleur ? Quelles différences entre les chants des oiseaux ? Comment se forment ou se déplacent les nuages, et pourquoi ? Repérer et identifier quelques constellations dans la nuit étoilée, et les retrouver tous les soirs... Ou de l'observation des personnes : un nouveau comportement chez soi ou dans son entourage.
Un nouveau mot dans son vocabulaire, un nouveau bricolage, une nouvelle idée, une nouvelle recette... tout, absolument tout est bon à prendre ! Toutes les sources sont possibles : l'observation et la recherche personnelle, l'enfant avec ses connaissances de l'école et des copains, le conjoint, les copains et la famille par téléphone, la radio, internet, les livres...

Le bilan de la journée :

Chaque soir : faire le bilan de ces petites et grandes choses réalisées dans la journée : aujourd'hui j'ai appris …, j'ai réalisé …., j'ai pu faire …., j'ai téléphoné à …., ce que j'appelle les « petits bonheurs » et la journée qui semblait identique à la précédente a finalement été remplie de pleins de nouveaux petits bonheurs.

Et se féliciter d'avoir passé une si bonne journée. Si ça n'a pas été le cas : demain sera une très bonne journée.

3. Les besoins de chacun

Se créer son petit « territoire », physique et mental, et le défendre de toutes ses forces

Vaste sujet, particulièrement sensible lorsque l'on est confiné à plusieurs.

Voici 5 affirmations qui n'engagent que moi sur lesquelles s'articule la suite :

1- chacun a des besoins qui lui sont propres
2- les besoins de l'un ne sont jamais exactement identiques à ceux de l'autre
3- ce qui peut être très difficile à concevoir ( je sais -mieux que toi -ce qui est « bon » pour toi = ce dont tu as besoin)
4- il n'y a aucune raison objective pour que les besoins de l'un soient plus importants que ceux de l'autre 
5- la promiscuité peut mener à l'ignorance des besoins de l'autre et à l'intolérance.

D'où la nécessité de définir son petit territoire à soi répondant à ses besoins propres. Mais quels sont-ils ?

Identifier ses besoins, et ceux de son entourage

Phrase souvent lue dans des publications psycho mais comment connaître ses besoins quand on est toujours en train de courir et de satisfaire les besoins des autres ?
Qu'est-ce-qui vous convient, à vous ? Et à chaque personne de votre entourage ?  

  • se projeter dans l'avenir plus ou moins lointain ? Ou vivre au jour le jour
  • imaginer le pire pour y être préparé ? Ou attendre et voir venir selon l'évolution de la situation
  • contrôler au maximum son environnement (y compris les personnes) ? Ou laisser l'environnement prendre le contrôle
  • organiser sa journée ? Ou faire au fur et à mesure des envies et des besoins
  • accumuler les objets, avoir sous les yeux des souvenirs réconfortants en en mettant le plus possible au cm2? Ou tout ranger pour laisser le regard libre sans rien pour l'arrêter
  • quand quelque chose ne va pas : parler peu, faire son hérisson ? Ou parler pendant des heures de ses préoccupations
  • se fatiguer physiquement jusqu'à tomber ? Ou se vautrer paresseusement dans son fauteuil préféré ?
  • rêvasser des heures ? Ou enchaîner les activités, voire en mener plusieurs en même temps
  • mettre la musique à fond pour l'entendre vibrer dans ses os comme puissant stimulant pour d'autres activités ? Ou plutôt le chant des oiseaux, le clapotement de la mer sur la coque du bateau
  • besoin de tendresse fusionnelle ? Ou d'un peu d'intimité et de solitude
  • etc...

Il n'y a pas de jugement de valeur dans ces propositions , elles ont la même importance comme stratégies personnelles pour se sentir bien dans sa vie, se rassurer et être rassuré. Ces stratégies sont tapies dans de multiples détails, parfois incompréhensibles pour l'entourage, qui ne fonctionne évidemment pas de la même façon.

Cependant, pour éviter justement que certains comportements empiètent trop sur les stratégies rassurantes des autres personnes de l'entourage, on peut être attentifs aux points suivants :

l'espace physique :

  • Pour conserver une liberté de mouvement : avoir un endroit où se loger, et dans cet endroit, une place où s’asseoir, s'allonger, sans être systématiquement délogé, dérangé, poussé, voire déplacé comme un meuble ; avec la possibilité de pouvoir mener son/ses activités dans les meilleures conditions possibles.
  • Pour se sentir chez soi , ce qui va avec la notion de territoire : avoir une place où ranger ses affaires / ou alors les laisser traîner; où les affaires « empruntées » retournent à leur place sans devoir mettre en branle la fouille archéologique de tout le logement pour les retrouver/ ou alors sont rangées maniaquement et donc introuvables parce que « je les avais laissées là, si, je me souviens bien » ! C'est à dire avoir un petit coin bien à soi et bien identifié, et respecté.

l'espace sonore :

Le bruit, ou l'absence de bruit, peut être aussi stressant pour l'habitué du silence que pour le fan de musique :« ce bruit permanent me porte sur les nerfs et m'agresse» s'oppose à « ce silence m'angoisse » . Comment concilier les deux ? Dans une journée : partager ! Chacun a à moitié ce dont il a besoin (et est stressé l'autre moitié du temps, ce qui est toujours mieux que de l'être tout le temps).
Moins flagrants, les petits bruits répétitifs: la petite cuillère dans la tasse à café, le « glubs » du déglutisse ment, le plancher qui couine quand on marche, les portes qui claquent, tous ces petits bruits qui peuvent être très très agaçants en vie confinée. C'est gérable en identifiant ce qui énerve prodigieusement l’autre ET qui peut être changé, et que la différence entre les deux soit comprise.

l'espace visuel :

Le combat: tempérament ordonné contre un tempérament envahissant (mot tendre pour bordélique), qui va l'emporter ? Personne! Le maniaque de l'ordre préserve le territoire surchargé de l'autre et retient sa soif de rangement compulsif. L'envahissant évite de coloniser lentement mais sûrement le territoire ordonné de l'autre. A chacun son territoire !

De même pour la propreté du logement : en général tout le monde préfère vivre dans un environnement propre, mais certains s'accommodent mieux que d'autres d'une propreté relative (phrase citée de mémoire, si joliment formulée et écrite par Bernard Moitessier). Vivre dans un logement propre est avant tout une question d'hygiène générale, c'est de plus beaucoup plus agréable à voir et à sentir. Un peu de bonne volonté de la part de chacun pour ne pas trop salir, et nettoyer après son passage... pour soi … et pour les autres.

l'espace olfactif :

dépendant de l'hygiène et des activités.

Les odeurs, agréables ou pas, peuvent venir des corps et du linge. En bateau, nous devons surveiller la consommation d'eau douce et lorsque les réserves nous permettent juste de boire, cuisiner et nous laver, la lessive ne devient plus une priorité. Elle sera faite lorsqu'il y aura un robinet d'eau douce à terre, ou une grosse averse...En attendant, il faut stocker le linge sale sans que ça empuantisse le bateau. L'hygiène corporelle est une priorité, à coup de lingettes en dernier recours en navigation quand c'est vraiment impossible d'envisager une petite douchette... Quel bonheur que la première vraie douche après quelques jours ou semaines de navigations ! Ah, sentir bon partout ! C'est vraiment plus agréable de pouvoir laver et se laver très régulièrement ...
Et pour parfumer, assainir l'air et dégager les voies respiratoires: un peu d'huile essentielle d'eucalyptus!

Parfois, ce sont les odeurs des produits d'entretien ou de réparation du bateau qui décapent les sinus (et sont même hautement toxiques), difficile d'y échapper en espace réduit, on peut au mieux limiter l'exposition en se mettant le nez au vent.

Les odeurs de pain ou de brioche cuisant au four ne posent par contre jamais de problème. Bizarre...

Des activités stimulantes :

Quelles soient physiques, intellectuelles, manuelles, créatives, imaginaires... avec de bonnes conditions pour pouvoir les réaliser : un peu de place, un fond sonore ou pas, son matériel étalé à porté de main … cela rejoint les points précédents.

Une journée que je considère comme satisfaisante est une journée où j'ai pu bouger + créer + réfléchir + utiliser mes mains. La cerise sur le gâteau est d'avoir pu avoir en plus des contacts sociaux.

 

4. Préserver son mental de vainqueur

... et limiter l'exposition au stress

Nous ne sommes pas égaux vis à vis de l'anxiété, il y aurait même une composante génétique. Néanmoins, le but est d'être le mieux possible avec soi-même et avec son entourage dans des conditions qui ne dépendent pas entièrement de notre volonté.

Nous ne pouvons pas contrôler le confinement actuel dû au coronavirus et la perte de la liberté de déplacement. Vous êtes confinés chez vous, nous sommes confinés au bateau et le bateau est assigné à rester dans la baie où nous sommes pendant la durée du confinement et nous sommes conscients d'être de très très grands privilégiés pour notre lieu de confinement. Les quelques paragraphes précédents peuvent aider à bien vivre individuellement cette période.

Nous ne pouvons pas non plus contrôler les personnes avec qui nous partageons ce confinement.
Amis solitaires, voila ce à quoi vous échappez... Je plaisante à moitié et j'imagine sans peine que le confinement en solitaire génère d'autres sources de préoccupations et parfois d'anxiété.

Des tempéraments différents
Ex 1: l'un est plutôt zen dans sa tête, l'autre anxieux et pessimiste de nature. Chacun a ses sujets de préoccupations, sa façon d'aborder et de vivre une situation donnée. Malheureusement, cette différence de vue peut tourner à la grosse bagarre verbale : "mais ouvre les yeux, regarde comment est le monde/ la situation !" dit le pessimiste... "mais arrête de ruiner mon optimisme dès le matin avec tes visions noires du monde/de la situation !" disait l'autre. L'optimiste peut être conscient du coté négatif, voire très négatif, d'une situation mais il ne se concentre pas dessus ; le pessimiste peut également voir le côté positif mais se concentre sur le pire. Au fond, on est d'accord : on ne s'attarde pas sur les mêmes aspects, mais on voit bien les mêmes choses. Pourquoi s'énerver ?

Ex 2: l'un est plutôt très bavard, l'autre plutôt taciturne. A votre avis, qui occupe l'espace de parole ? Qui souffre de ne pas avoir accès aux préoccupations, idées, activités, émotions de son compagnon de confinement ? Qui souffre d'avoir la tête remplies des préoccupations, des activités, des idées, des émotions, des angoisses de l'autre ? Cela peut convenir aux deux, mais pas toujours. Le bavard saoule le taciturne et il n'entend pas le taciturne quand il s'exprime car le taciturne a la mauvaise habitude d'être très synthétique : en deux ou trois phrases, il a tout dit. Le taciturne entend trop le bavard et son espace mental est noyé sous le flux d'informations. Crise larvée : le bavard continue à parler, le taciturne se tait de plus en plus, chacun peut se sentir très seul.  Allez les taciturnes, un effort pour dire tout ce qui tourne en boucle dans la tête, et les bavards, laissez 2 secondes de pause entre chaque paragraphe de votre discours pour donner l'occasion au taciturne de s'exprimer – sans lui couper juste après la parole !

Ex 3: le tempérament indépendant ne veut pas de conseils à moins d'en demander, et n'en fait pas sans sollicitation; c'est sa façon de préserver son autonomie et celle de l'autre. Le tempérament protecteur a tendance à donner des conseils et faire des remarques sur les façons de l'autre: c'est sa manière de se soucier et prendre soin de l'autre. L'un se sent envahi, l'autre pas soutenu. Ce sont deux visions très différentes de l'attention et de l'intérêt que l'on peut porter à l'autre. Honnêtement, les conseils 24/24 et 7/7 sont énervants, aussi bien intentionnés qu'ils soient.

Et vous, à quelles différences de tempéraments êtes-vous confrontés ?

Le partage de ressources limitée :

Quand le stock de denrées est fait, la fourmi s'oppose à la cigale : « gérer le stock pour avoir de la diversité plus longtemps » contre « on se fait plaisir maintenant et quand il n'y en aura plus, tant pis ! ». Le premier fait figure de gros radin, le second de gros inconscient. Le radin finit par cacher, le malin cherche et trouve...parfois ! Quand cela est possible, choisir des versions d'aliment que l'un aime et l'autre pas, chacun peut vivre son rythme de consommation sans culpabiliser (ex : 2 tablettes de chocolat au lait en deux jours pour la cigale, deux tablettes de chocolat noir en deux semaines pour la fourmi, ça marche).

Il peut aussi s'agir de partager une connexion limitée à internet donc de l'ouverture sur le monde extérieur, très importante en ce moment. Ou encore de l'eau douce pour nous : lessive tout de suite ? Ou rinçage du moteur? 

C'est mieux d'éviter d'en arriver au stade d'aigreur ou d'irritation comme : « il/elle bénéficie plus que moi de ci/de ça et ça fait ch... il n'y a pas de raison ! », voire à l'intolérance franche et massive « puisque c'est comme ça, je consomme tout d'un coup ! Il n'y en aura plus pour personne après !».

Plus constructif :

  • se demander « ai-je vraiment besoin de cela ? »
  • Si oui, comment négocier un partage plus équitable ?
  • Si la négociation est impossible : comment bien le vivre ? Par exemple en se délimitant un petit territoire avec des choses, des activités, qui ne nécessitent pas d'être partagées.

A propos d'internet, requête aux grands manitous qui programment les mises à jour automatiques, serait-il possible de suspendre ces mises à jours automatiques pendant cette période d'épidémie et de confinement pour pouvoir conserver son forfait limité ( il n'existe pas de forfait illimité là où nous sommes) à des choses vraiment importantes en ce moment, comme s'informer, communiquer avec ses proches très régulièrement... Une petite mise à jour = 10 appels whatsapp avec ma famille à 20000 km d'ici que je ne ferai pas. Merci ! C'est beau l'espoir...

Les personnalités stressantes :
Lorsqu'une situation devient dangereuse et que nous sommes plusieurs à la vivre, chacun est anxieux, stressé et essaye de trouver des stratégies pour gérer cette anxiété.

Pour l'un, c'est plus fort que lui, il faut qu'il parle, donc il déverse sur l'autre toutes ses angoisses, ça lui fait du bien de pouvoir partager ça avec quelqu'un. Mais voilà, le quelqu'un en question essaie déjà de gérer sa propre anxiété, à laquelle s'ajoute celle générée par l'expansif, et celle de ne pas pouvoir l'aider, car aucune parole, aucune aide n'est acceptée, il s'agit juste de se délester d'un peu de stress dans cette situation. Alors d'accord pour vous écouter un moment, pas d'accord pour vous écouter en boucle pendant des heures. On a nos limites de résistance, que diable !

Pour l'autre, donc plus réservé, tout se passe à l'intérieur et cette attitude "détachée" agace prodigieusement car elle semble indiquer qu'il n'en a rien à faire, qu'il n'est pas conscient des problèmes, bien réels. Raté, c'est juste que ça ne sort pas mais on n'en pense pas moins, et parfois avec des scénari bien pires que ceux qui sont verbalisés.

La montée des tensions :

Lorsque les besoins ne sont vraiment pas satisfaits, la frustration monte. Une discussion paisible entre personnes permet au mieux de mettre à plat la situation et trouver des solutions satisfaisantes pour chacun (encore faut-il qu'elles soient appliquées), au pire : que rien ne change. Et la frustration continue de monter. Deux solutions : la résignation, mais on est loin du mental de vainqueur, ou la prise de pouvoir : cette fois, c'est vous le vainqueur mais le frustré a changé de camp. Ni l'une, ni l'autre solution ne fait avancer les choses. Il vaut mieux insister, insister, et encore insister jusqu'à ce que le message passe et soit suivi d'effet, toujours dans un climat paisible et bienveillant.

Sauf que... parfois les discussions deviennent de moins en moins paisibles, le ton monte, l'énervement avec, chacun campe méchamment sur ses positions. C'est dur à vivre en espace confiné, source de stress intense pour tous les protagonistes. Sans accuser l'un ou l'autre, c'est l'énervement croissant et conjoint de plusieurs personnes qui aboutit au blocage dans une situation non satisfaisante. Le mieux est de rester à la première étape de la discussion paisible. Plus facile à dire qu'à faire.

Quand plus rien ne marche : allier activité et passivité, c'est à dire:  se forcer - à se taire.
Pour ne pas envenimer une « discussion animée », pour ne pas tendre une perche et relancer ladite  discussion animée, pour ne pas involontairement ou au contraire tout à fait volontairement provoquer l'autre (parce qu'il/elle est vraiment saoulant là), pour ne pas répondre aux provocations. Il faut pouvoir se supporter pendant encore ?? jours, ou ?? semaines. On a vécu ça en navigation, où il est impossible de s'échapper du bateau pour aller faire un tour et se rafraîchir la tête. Pour aller où ? On est à des milliers de km de toute terre. Et comment ? À la nage ???? Avec l'incertitude sur la durée pendant laquelle nous allions rester en circuit fermé : encore une semaine ? Encore 15 jours ? Plus ? 

On ne se supporte (presque) plus... mais c'est temporaire !
Les tics, les façons de faire, les habitudes, les commentaires, les remarques anodines, la mise à distance de l'autre, les discours, les visions des choses, les besoins, bref, tout est énervant chez l'autre à force de le vivre 24/24, 7/7 sans voir personne d'autre, pendant des jours, des semaines, des mois.... La pression monte, l'intolérance aussi, les remarques fusent, eh oui, nous sommes alors l'un pour l'autre un grand sujet d'observation, de décorticage devrais-je dire de ce qui est « bien » chez l'autre mais surtout de ce qui ne va pas, donc d'insatisfaction.

Lorsque la situation devient explosive, une solution pour ne pas prendre trop cela à cœur et laisser les choses à leur juste place consiste à s'isoler mentalement, à défaut de physiquement, en se concentrant sur une activité « doudou » pour vider la tête de l'ambiance pesante, avec son activité à soi, en attendant que la pression interne et externe redescende.

On peut aussi essayer de devenir l'homme ou la femme invisible. Ou de transformer son/sa compagnon/compagne de confinement en homme/femme invisible en lui mettant la pression, mais ce n'est pas très sympa...

Parfois, la stratégie de l'invisibilité ne marche: il/elle ne veut vraiment pas vous laisser tranquille. Lorsque la confrontation désagréable et qui n'avance à rien est inévitable, essayer alors de toutes ses forces de ne pas se laisser pourrir le mental, de ne pas se laisser déborder par les émotions mais de rester très (terriblement ) rationnel. Lorsque la raison ne peut rien faire, faire défiler des souvenirs joyeux, les visages de proches souriants, en essayant de les faire passer au premier plan de ses pensées et de mettre au deuxième plan la cruelle réalité de l'épisode conflictuel. Bref, c'est une fuite momentanément dans sa tête, à défaut de pouvoir fuir physiquement, jusqu'à ce que les tensions disparaissent.

 

 

De l'importance de l'activité physique

Selon moi, c'est LE facteur fondamental pour baisser le niveau d'anxiété et augmenter le bien-être physique et mental, il est indissociable des activités-détente, lorsque l'on est confiné et que l'on ne peut plus échanger avec d'autres que ceux avec qui l'on vit (et que l'on n'a pas de réseau, donc ni téléphone ni internet...). L'activité physique n'est pas forcément du sport avec tout ce que cela implique : des installations, un club, de l'espace etc... C'est faire bouger son corps, à la fois en petite musculation d'entretien et en exercices de détente. Ah tiens : on a aussi un corps, pas seulement une tête qui pense … trop !

Faire jouer les muscles des jambes est important pour la circulation sanguine générale : les veines des jambes sont les réservoirs de sang de l'organisme. Le travail des muscles des jambes « masse » les veines des jambes et favorise le retour du sang, des veines jusqu'au cœur ( le cœur ne propulse le sang que dans les artères, pas dans les veines). Et les jambes sont plus légères...
La musculation des
abdos aide à combattre les douleurs et blocages du bas du dos, à condition de faire ses abdos avec un dos à plat sur le sol, sans être cambré.
Les étirements et 
assouplissements libèrent les tensions des articulations, l'idéal est de mobiliser chaque articulation l'une après l'autre pour l'assouplir et l'entretenir, sans oublier l'ensemble de la colonne vertébrale, du cou aux lombaires.

Tentez et persistez dans n'importe quelle activité physique, seul(e) ou à l'aide de tutos, un peu / beaucoup , tous les jours. D'une part, on se concentre sur son corps et ses sensations (sentir ses tensions qui se dénouent, le sang qui circule mieux, ses jambes moins lourdes, le rythme de sa respiration...) d'autre part, cela change vraiment les idées.

Personnellement, après 30 minutes d'exercices issus d'échauffements de danse, de postures de yoga et de relaxation, j'ai l'impression que mon corps flotte 10 cm au dessus du sol et que mon mental n'est plus confiné dans sa petite boite crânienne mais s'est étendu jusqu'à l'horizon. Je précise bien : uniquement avec quelques exercices physiques. Au bateau, il faut chercher la place : pour chaque exercice, je dois me déplacer de quelques cm pour avoir l'espace pour étendre les bras, ou les jambes, ou le dos, mais jamais les trois à la fois, sans me cogner à l'échelle de descente, l'ameublement ; certains exercices d'équilibre sont simplement impossibles car le bateau bouge et j'ai sérieusement tendance à me casser la figure. Soyez heureux d'être sur un sol horizontal et immobile pour vous éclater physiquement !

 

Et pour conclure...

Isolement + promiscuité + confinement = mélange détonnant, à manier avec précautions! 
La question est tout juste abordée, il y aurait tellement à dire.

Lorsque je me sens juste frustrée d'être bloquée dans mes mouvements ou dans mes activités ( il manque ci pour faire ça : pas de place, pas le temps, pas le matériel, pas de sortie, pas de social, pas nouvelles de vive voix de la famille, il n'y a pas... quoi!), je me dis que tant qu'à être temporairement bloquée dans cette situation, autant la vivre le mieux possible.

Qu'est ce que je peux faire, là , tout de suite, avec ce que j'ai sous la main  et l'espace dont je dispose ?

  • du silence ? Lecture, sudoku, écriture
  • du bruit ? Activité manuelle et créative
  • ambiance pourrie ? Lecture sur un sujet bien difficile pour me forcer à me concentrer sur autre chose que mon gros malheur ; ou alors stratégie de la femme invisible ; ou création artistique
  • de la place ? De la gym
  • de l'eau ? La lessive et le grand nettoyage du bateau
  • température ambiante inférieure à 35 °C ? Allez, vite du pain ou un gâteau.
  • pas assez d'énergie dans les batteries? On oublie l'ordinateur et retour aux activités créatrices et manuelles

J'ai longtemps cherché des informations sur internet sur la vie en isolement, en confinement, avec promiscuité, parce que je ne connaissais rien de cela dans ma vie antérieure à la vie de bateau et que cela me posait un petit problème d'adaptation. Je n'avais pas trouvé grand chose à l'époque. Suite à une émission que je viens d'écouter à la radio, je me rends compte que l'expérience s'est faite sur le terrain et que ces stratégies de bien-être physique et mental font partie de ma vie depuis des années.
Je n'ai pas été « sélectionnée » pour mes extraordinaires capacités d'adaptation à l'isolement et à la promiscuité comme un astronaute ou un sous-marinier, je n'ai pas forcément l'envie ni le besoin de relever de grands défis comme un explorateur solitaire ou un vainqueur de tour du monde à la voile. Je suis une femme de bateau depuis 7 ans.

 

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